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Ingérences étrangères : l'Assemblée lance des débats tendus, en pleine campagne européenne

Ingérences étrangères : l'Assemblée lance des débats tendus, en pleine campagne européenne
Publié le 26 mars 2024 à 19:09, mis à jour le 26 mars 2024 à 19:10

Paris (AFP) - Registre pour les agents étrangers qui pratiquent du lobbying, renforcement des prérogatives des services de renseignement : les députés ont lancé mardi l'examen d'un texte macroniste contre les ingérences étrangères, dans un climat parfois tendu sur fond de campagne européenne.

"Il en va de la protection de notre souveraineté, de nos valeurs démocratiques et libérales, de la protection des intérêts de la Nation", a souligné Sacha Houlié, président Renaissance de la commission des Lois et rapporteur du texte, en ouvrant les débats.

"Le Parlement ouvre aussi un chemin pour nos voisins européens et alliés à travers le monde", a abondé le ministre délégué chargé de l'Europe, Jean-Noël Barrot, favorable au texte.

Le texte est également porté par le président de la commission de la Défense Thomas Gassilloud et la députée Constance Le Grip, auteure d'un rapport parlementaire sur les ingérences, qui accusait le Front national (devenu Rassemblement national) d'avoir été une "courroie de transmission efficace" du Kremlin.

En pleine campagne pour les élections européennes, les premiers échanges ont été émaillés d'invectives entre le camp présidentiel et les oppositions, dans un climat tendu.

Le député RN Jean-Philippe Tanguy a fustigé à la tribune un "cynisme électoral" ayant conduit, selon lui, à la présentation de ce texte, et "un mensonge d'Etat" de la macronie.Sacha Houlié a dénoncé en retour un "délire mégalomane et égocentrique", "pour se dédouaner" de liens avec la Russie.

Les Républicains soutiendront le texte, mais Ian Boucard a critiqué un manque d'ambition et accusé la majorité de se servir du texte pour instaurer une "illusion de duel avec le Rassemblement national".

Sur le fond, la proposition de loi entend instaurer une obligation pour des représentants d'intérêts étrangers qui font du lobbying en France de s'inscrire sur un registre national.Une idée inspirée notamment du Foreign Agents Registration Act américain, avec un régime de sanctions pénales pour les contrevenants.

Ce registre serait géré par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).Un amendement de M. Houlié prévoit d'exclure les États membres de l'UE de son périmètre.

Mais la question des entités exemptées fait débat.La gauche espère davantage de garde-fous pour les journalistes, les partis étrangers d'opposition ou les ONG, mais seuls le personnel diplomatique et consulaire et les agents d'un État étranger pourraient in fine être dispensés.

- algorithmes de la discorde -

Les débats, qui dureront sans doute jusqu'à mercredi, devraient monter encore d'un cran lors de l'examen de l'article phare.

Celui-ci prévoit d'élargir un dispositif de surveillance algorithmique lancé en 2015, destiné à repérer des données de connexions sur internet, aujourd'hui circonscrit à la lutte antiterroriste, mais pour laquelle l'intérêt semble toutefois limité, selon M. Houlié.Les modes d'action des ingérences seront quant à eux plus facilement identifiables, plaide-t-il.

"La cause semble noble et consensuelle, (mais) au final c'est un texte scélérat parce que, sous couvert de lutte contre les ingérences étrangères, il vise à aggraver la surveillance généralisée", a dénoncé le député LFI Bastien Lachaud.Mais sa motion de rejet au texte a été largement repoussée par 182 voix contre 34.

La proposition de loi prévoit une expérimentation de quatre ans, durant laquelle les services de renseignement pourraient y recourir au titre de "l'indépendance nationale", "l'intégrité du territoire et la défense nationale", des "intérêts majeurs de la politique étrangère", de "l'exécution des engagements européens et internationaux de la France" et de la lutte contre les ingérences.

Un périmètre large, qui inquiète à gauche, où la majorité espère grappiller des voix écologistes et socialistes : "je plaide pour limiter strictement la question aux ingérences étrangères lorsque les intérêts fondamentaux de la Nation sont en jeu", souligne l'écologiste Jérémie Iordanoff, qui oscille entre "vote pour et abstention". 

"On est toujours dans la même configuration, on commence par l'antiterrorisme qui sert de cheval de Troie, et puis ça fait tache d'huile", fustige le député LFI Aurélien Saintoul.

Plusieurs députés critiquent également l'absence d'étude d'impact des propositions ou de passage devant le Conseil d'Etat, Sacha Houlié rétorquant que le Parlement a produit suffisamment de matière pour éclairer les débats.

sac-sl-adc-cds/hr/jg

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