"Une attaque quotidienne": la vie sous Trump quand on est ado transgenre

New York (AFP) - Comme beaucoup d'amis de son âge, la vie de Lorelei Crean, 17 ans, se partage entre le lycée, la recherche d'une université et les sorties.Mais avec l'arrivée de Donald Trump au pouvoir, cette jeune personne transgenre se sent "attaquée" tous les jours et passe à l'action pour défendre sa communauté.
"Il se passe beaucoup de choses.J'ai l'impression d'aller à un événement chaque semaine", raconte Lorelei, en énumérant une liste de manifestations pour s'opposer à l'offensive du président des Etats-Unis contre la communauté transgenre: "cela me propulse dans l'action".
Depuis trois mois, Donald Trump a mis un coup d'arrêt aux avancées des droits des personnes trans dans la société.Dès son investiture, il a proclamé qu'il n'y a que "deux sexes, masculin et féminin", et une seule "vérité biologique".
Première conséquence: la fin de toute mention neutre "X" sur les passeports ou certificats de naissance de certaines personnes, qui ont reçu des documents officiels leur assignant un genre différent de celui qu'elles ont choisi.
"Avec d'autres, on s'est empressé de changer nos papiers", avant que la mesure ne prenne effet, dit Lorelei, dans un parc proche de son domicile, dans le quartier de Washington Heights à Manhattan.
"Mon nouveau certificat de naissance est arrivé par la poste avec un passeport de genre X (...) Mon existence est en quelque sorte en contradiction avec la déclaration de Trump", souligne l'ado.
- "Poids" -
Donald Trump a aussi essayé d'interdire aux personnes transgenres de servir dans l'armée américaine, banni toute référence aux trans dans les conseils de voyage du département d'Etat et puni les Etats américains qui autorisent les athlètes trans dans le sport.
"On reçoit tout le temps une nouvelle notification, 'information urgente': Trump a encore fait quelque chose de fou ou d'illégal", raconte Lorelei.
"C'est quelque chose qui pèse sur nous tous.Pas seulement sur moi en tant que jeune trans, mais sur tous mes amis, les personnes issues de la diversité, les autres personnes queer.C'est une attaque quotidienne".
Concilier le lycée, les visites d'universités et l'activisme n'est pas toujours évident.
"Parfois, ce sont mes parents qui me disent: 'Non, tu dois faire tes devoirs!' Je dois aller en cours, étudier, je suis encore jeune.Mais je dois aussi porter le poids d'une vie de jeune transgenre dans l'Amérique d'aujourd'hui", dit Lorelei.
Pour son père, Nathan Newman, 57 ans, le fait d'avoir "pu canaliser ses sentiments, non pas en se sentant désespéré, mais en voyant que c'est possible d'agir, c'est une bonne chose".
- "Capitulation" -
Le choix de l'université est devenu plus compliqué, alors que les droits des transgenres varient beaucoup entre Etats progressistes et conservateurs aux Etats-Unis.
D'après l'organisation Human Rights Campaign, 26 Etats interdisaient déjà les thérapies hormonales de transition pour les mineurs quand Donald Trump est revenu au pouvoir.
"Il y a tellement d'universités situées dans des Etats qui ne me permettront pas d'accéder à des soins de santé, ou dans lesquels je ne pourrai pas utiliser des toilettes qui correspondent à mon identité dès que je sortirai du campus", explique Lorelei, en résumant: "selon l'État où je vais, je n'aurai pas de droits".
Même dans l'État très démocrate de New York, au moins un réseau hospitalier a suspendu l'accès aux traitements de transition pour les jeunes après que Donald Trump a pris des mesures pour les interdire pour les moins de 19 ans.
"Une capitulation", pour Lorelei, selon qui "c'était l'un des premiers signes que l'administration Trump allait être différente de tout ce qui s'était passé auparavant".
Lorelei Crean ne se laisse pas abattre et veut continuer l'action, qui lui donne de l'optimisme.
"Les gens descendent dans la rue alors qu'ils ne le feraient pas d'habitude (...) Il y aura probablement une manifestation le 30 avril", pour les 100 jours depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, "à laquelle je participerai, mais pour l'instant, on se concentre sur les problèmes de la semaine".