Bétharram: l'audition de Bayrou "pas un aboutissement, une étape", selon les victimes

Bordères (France) (AFP) - L'audition de François Bayrou mercredi par la commission d'enquête parlementaire consacrée au scandale de violences physiques et sexuelles à Notre-Dame-de-Bétharram n'est "pas un aboutissement" mais seulement "une étape", a réagi le porte-parole du collectif des victimes de l'établissement catholique.
"À celles et ceux qui espéraient que cette audition permettrait de tourner la page, nous répondons que ce 14 mai n'est pas un aboutissement, c'est une étape", a déclaré Alain Esquerre, entouré d'une dizaine de victimes, lors d'une conférence de presse à Bordères (Pyrénées-Atlantiques), village où réside aussi le Premier ministre.
"Nous, les victimes, on ne rentre pas dans ce jeu politique, on s'y refuse catégoriquement", a-t-il dit, jugeant néanmoins le chef du gouvernement "un peu malmené" par les parlementaires.
"François Bayrou ne représente pas l'enjeu principal de notre combat.Il fait partie d'une chaîne de responsabilités", a fait valoir Alain Esquerre, estimant "qu'il y a une responsabilité collective."
Ayant suivi chez l'un d'eux l'audition du Premier ministre, élu local des Pyrénées-Atlantiques, ancien ministre de l'Éducation nationale (1993-1997) et parent d'élèves scolarisés à l'époque à Bétharram, les membres du collectif ont réclamé des "annonces fortes" sur la protection de l'enfance.
"Nous n'avons rien obtenu de ce que (François Bayrou) nous a promis le 15 février", a souligné Alain Esquerre, sauf un plan pour renforcer les contrôles dans les établissements privés.
Le collectif réclame notamment "des moyens renforcés pour la justice", "une évolution de la loi sur la prescription des crimes sexuels subis par les enfants" ou encore "la création d'une structure animée par les victimes, pour les victimes".
Jean-Rémy Arruyer, ancien élève qui n'attendait "pas grand-chose de cette audition", "aurait aimé un peu plus de hauteur".
"À son époque, il a fait ce qu'il devait faire, tout simplement.Contrairement à d'autres", a estimé un autre membre du collectif, Thierry Sauthier.
Jean-François Lacoste-Séris, père d'un élève blessé en 1995 par une violente gifle d'un surveillant de Bétharram, a voulu rectifier un point avancé par François Bayrou: l'ancien ministre de l'Éducation a évoqué un courrier du directeur de l'établissement au recteur d'académie selon lequel ce laïc, condamné pour "coups et blessures" en 1996, a été licencié quelques mois après une inspection diligentée par son administration.
"Il n'a pas été viré après sa condamnation, il a été promu et il est resté à Betharram", a pointé M. Lacoste-Séris, estimant que le Premier ministre avait "menti" ou était "mal documenté" sur ce point.
"Je compte sur la commission d'enquête pour retrouver les documents qui contredisent François Bayrou", a-t-il dit.
Mis sous pression politique dans cette affaire, le Premier ministre est notamment accusé par la gauche d'avoir été au courant dans le passé, des agissements dénoncés aujourd'hui, et d'être intervenu dans une affaire judiciaire impliquant un religieux de Bétharram.
François Bayrou a démenti fermement à plusieurs reprises, dénonçant encore mercredi une "instrumentalisation" politique.
Plus de 200 plaintes, la plupart concernant des faits prescrits, ont été déposées dans ce dossier de violences physiques et sexuelles s'étalant sur plusieurs décennies.