A la cathédrale de Chicago, la "très belle surprise" d'un pape venu de sa banlieue

Chicago (AFP) - Paula Hambrick n'aurait "jamais cru qu'il y aurait un pape venu des Etats-Unis, encore moins de Chicago", s'étonne cette fidèle venue assister dans la cathédrale de la ville à la messe célébrée vendredi matin en l'honneur du nouveau pape, Léon XIV.
"Il y a trois choses que j'espérais voir dans ma vie : les Cubs (l'une des deux franchises de baseball de Chicago, ndlr) gagner les World Series (le championnat américain), une femme devenir présidente (des Etats-Unis) et un pape américain.J'en suis à deux sur trois ! C'est un bon ratio, non ?", lance à l'AFP la septuagénaire, originaire de la banlieue sud de la métropole du nord des Etats-Unis, comme Robert Francis Prevost, élu successeur du pape François par le conclave la veille, dans le secret de la chapelle Sixtine.
"C'est merveilleux", apprécie-t-elle à la sortie de la messe.
Sous la voûte de bois délicatement ouvragée de la cathédrale de Chicago, nichée entre les buildings, l'effervescence bourdonnante de la place Saint-Pierre est très loin.A huit heures, pour la cérémonie en l'honneur du nouveau souverain pontife, les rangs sont plus fournis que pour le premier office du jour, une heure plus tôt, mais ils restent clairsemés.
Parmi les 200 à 300 fidèles réunis, Alejandro Mendoza, bientôt 25 ans, se sent une certaine proximité avec Léon XIV, dont il décrit l'élection comme une "très belle surprise" : lui aussi a grandi dans les quartiers sud de Chicago.
- "D'où je viens" -
"Je dis à tout le monde que le pape vient d'où je viens, sourit le jeune homme.C'est une fierté particulière."
"Il vient de Dolton, j'ai grandi pas très loin, reprend-il.Je suis allé à la paroisse St Rita, lui a enseigné à l'école St Rita.Je sais que j'ai assisté à quelques messes qu'il y a célébrées.Mes amis essaient de trouver des photos, un de mes amis a réussi."
"J'ai l'impression de le connaître, poursuit-il.C'est très spécial.J'ai un lien particulier."
A Dolton, la modeste maisonnette en briques de l'enfance de Robert Francis Prevost est toujours debout.Une parmi d'autres, toutes alignées dans une allée de ce quartier à une quarantaine de minutes du centre de Chicago.
St Mary, l'église du quartier - jadis ouvrier, depuis paupérisé et rattrapé par les violences urbaines, selon d'anciens habitants - est elle largement délabrée.Le jeune Robert y a officié comme enfant de choeur.Derrière sa façade en pierres claires encadrée de briques, l'intérieur est à l'abandon, le choeur recouvert de graffitis, et on voit le ciel - la toiture est en partie effondrée.
Anciens du "southside", voisins ou curieux s'y pressent en pèlerinage maintenant que l'enfant du coin est devenu Léon XIV.
"On priait pour un miracle, il est notre miracle", veut croire Leah Morgan, ancienne photographe de 59 ans.Elle qui a grandi à deux rues rêve d'une "revitalisation" de son quartier de coeur avec l'effet pape, même si elle vit désormais dans le nord de la ville."Peut-être même restaurer l'église ?"
- "Figure prophétique" -
Dans les banlieues sud où soeur Maryjane Okolie, la cinquantaine, oeuvre depuis une quinzaine d'années, "tout le monde est enthousiaste, tout le monde en parle, les gens ont réagi très positivement", rapporte-t-elle.La religieuse espère voir Léon XIV "marcher dans les pas du pape François, pour les plus démunis et ceux réduits au silence".
De passage à Chicago pour la remise de diplôme de son fils, Nate Bacon, diacre de 61 ans dans une communauté du Guatemala depuis une quinzaine d'années, a d'abord "été stupéfait".
"A une époque où les Etats-Unis ont une attitude dominatrice, avoir un pape américain m'a semblé un facteur d'inquiétude.Mais quand j'ai appris qu'il avait passé des dizaines d'années au Pérou, que c'était plutôt quelqu'un qui construisait des passerelles et allait poursuivre l'œuvre du pape François, ça m'a rendu enthousiaste", raconte-t-il.
"Profondément triste de voir la destruction menée" par Donald Trump, il espère "qu'un pape né aux États-Unis sera une figure prophétique de retour aux valeurs de justice, de paix et d'accueil des étrangers, des migrants et de ceux que la société rejette".
Devenu Léon XIV, Robert Francis Prevost est forcément attendu dans sa ville natale.Pour l'évêque de Chicago, Lawrence J. Sullivan, une future visite serait une "joie immense".En attendant, ajoute-t-il, "nous devrions sans doute lui envoyer à Rome une +deep dish pizza+", la pizza spécialité de Chicago.