Sur TF1, Macron décline son action diplomatique et reste inflexible sur son bilan hexagonal

Paris (AFP) - Emmanuel Macron a longuement défendu, mardi sur TF1, ses huit ans d'action à l’Élysée, redoublant de pédagogie sur les questions internationales tout en restant inflexible sur sa politique intérieure, en repoussant notamment un référendum sur sa réforme des retraites.
Privé de majorité à l'Assemblée, largement cantonné depuis la dissolution de l'Assemblée à son rôle diplomatique dans un contexte de vives tensions planétaires, le chef de l’État a cependant esquissé quelques pistes pour la situation française, prônant notamment la tenue "dans les prochaines semaines d'une "conférence sociale".
Le "financement de notre modèle social" repose "beaucoup trop sur le travail", a jugé M. Macron, qui souhaite également l'ouverture d'une "négociation sociale" sur "la qualité" et "l'évolution des formes de travail".
Des pistes pour le gouvernement de François Bayrou, réputé avoir la main sur la conduite des affaires.Pour le reste, le président de la République a longuement défendu son bilan économique et social, de sa politique fiscale menée dès 2017 à la réforme des retraites adoptée sans vote par l'article 49.3, un an après sa réélection.
Pas question pour lui d'accepter un référendum sur cette réforme, comme le lui a suggéré la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, et alors que de possibles annonces référendaires étaient largement évoquées avant cette émission.
M. Macron a rappelé avoir été réélu en prônant une réforme des retraites."En face de vous, vous aviez l'extrême droite, même moi j'ai voté pour vous", lui a rétorqué Mme Binet.
Pas question non plus de nationaliser ArcelorMittal, touché par un plan social, mais Emmanuel Macron s'est engagé "les yeux dans les yeux" à "sauver" les sites de Dunkerque (Nord) et Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône).
Le chef de l’État, qui tente de renouer avec les Français après le pari raté de la dissolution, devait être interrogé sur une multitude de sujets, de la fin de vie aux finances publiques, après une entrée de jeu les crises internationales.
-Suspense référendaire-
Emmanuel Macron franchira-t-il le Rubicon du référendum, une tentation souvent exprimée depuis 2017 mais jamais suivie d'effet?
Il devait à tout le moins pendant la suite du débat préciser son idée de plusieurs questions simultanées, sur des thèmes variés, pour dépassionner le recours à cet outil qu'aucun président n'a osé dégainer depuis 2005 et la victoire du "non" sur la Constitution européenne.
Temps d'écran des enfants, fin de vie, réforme territoriale, immigration...le suspense est resté entier jusqu'au bout, alors que l'exercice reste très encadré par la constitution.
Sans surprise, le président du Rassemblement national Jordan Bardella a appelé le chef de l'État "à organiser un référendum sur l'immigration".
Dans le camp présidentiel, le chef des députés Modem Marc Fesneau a évoqué l'hypothèse d'une "règle d'or" contre les déficits budgétaires.
Jean-Luc Mélenchon, en meeting à Aubenas, dénonçant d'avance "un spectacle organisé", a plaidé de son côté pour l'instauration d'un "référendum révocatoire pour obtenir le maintien ou le départ" du président et le "référendum d'initiative citoyenne".
Devaient également intervenir face au chef de l’État le YouTubeur Tibo Inshape sur le sport à l'école, le journaliste Charles Biétry, atteint de la maladie de Charcot, sur la fin de vie.Une haltérophile devait l'interpeller sur le port du voile islamique dans le sport, précise encore TF1 sur son site internet.De même que la journaliste Salomé Saqué sur l'environnement et le maire de Béziers Robert Ménard sur la sécurité.
Face à lui, Emmanuel Macron a accepté le principe d'une extension des pouvoirs des polices municipales.
-"Rester libre" en Europe-
"Le défi des défis est, dans un monde de plus en plus dangereux, incertain, de rester libre", a lancé le chef de l’État lors de la première partie consacrée aux questions internationales.
Dans ce contexte, il a longuement exposé sa position sur l'Ukraine."Notre volonté, c'est de prendre des sanctions" dans les prochains jours si la Russie "confirme le non-respect" d'un cessez-le-feu, a-t-il assuré.
Emmanuel Macron a évoqué notamment des "sanctions secondaires" pour les "revendeurs" de "services financiers" ou d'"hydrocarbures", alors que Moscou n'a toujours pas répondu à la proposition des Européens, relayée par les États-Unis, d'un cessez-le-feu inconditionnel de 30 jours en Ukraine.
Un tel cessez-le-feu doit ouvrir la voie à des négociations "territoriales", a-t-il ajouté, pointant des choix douloureux à venir pour les Ukrainiens déjà évoqués par l'administration de Donald Trump.
"Même les Ukrainiens eux-mêmes ont la lucidité de dire (...) qu'ils n'auront pas la capacité de reprendre l'intégralité de ce qui est pris depuis 2014" par la Russie, a déclaré le chef de l’État.
Les événements autour de Ukraine semblent s'accélérer avec une possible rencontre russo-ukrainienne au sommet jeudi à Istanbul.
Le président des Etats-Unis Donald Trump, qui avait envisagé de s'y rendre, a toutefois précisé mardi qu'il y dépêcherait son chef de la diplomatie Marco Rubio.
En outre, dans les réflexions sur la défense européenne, la France est "prête à ouvrir" une discussion sur le déploiement d'avions français armés de "bombes" nucléaires dans d'autres pays européens, à l'instar de ce que font les Américains pour partager leur parapluie atomique, a par ailleurs annoncé Emmanuel Macron.
Plusieurs pays européens, de l'Allemagne à la Pologne, s'intéressent à l'idée française d'un parapluie nucléaire s'élargissant à l'Europe, alors que les États-Unis montrent des velléités de désengagement du continent.
Promettant d'en définir "le cadre de manière très officielle dans les semaines et les mois qui viennent", M. Macron a posé trois conditions à cette réflexion: "la France ne paiera pas pour la sécurité des autres", "ça ne viendra pas en soustraction de ce dont on a besoin pour nous", et enfin "la décision finale reviendra toujours au président de la République, chef des armées".
Ce que fait le gouvernement israélien de Benjamin Netanyahu, "c'est une honte", a par ailleurs répondu M. Macron à propos de la situation à Gaza, jugeant cependant que "ce n'est pas à un président de la République de dire +ceci est un génocide+, mais aux historiens".
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