Retraites: le PS veut censurer Bayrou, le RN renvoie aux budgets

Paris (AFP) - Un trimestre de gagné pour François Bayrou ? Le Premier ministre devrait survivre mardi à sa huitième motion de censure, déposée par les socialistes sur les retraites mais qui, faute des voix du RN, ne serait qu'un coup de semonce avant les discussions budgétaires à l'automne.
A l'ouverture de l'examen de la motion de censure, presque cinq mois après leur accord de non-censure pour laisser passer les budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale, les socialistes et le Premier ministre ont soldé leurs comptes.
En effet, le conclave sur les retraites entre partenaires sociaux, qui faisait partie de ce pacte de non-censure, s'est terminé sans accord.
Les socialistes reprochent à François Bayrou d'avoir promis dans son courrier initial une discussion entre partenaires sociaux "sans totem ni tabou", et d'avoir promis le "dernier mot au Parlement", avant de fermer la porte à un rabaissement de l'âge légal de départ et à l'idée de déposer un texte comportant la mesure d'âge au Parlement.
Le Premier ministre posait toutefois dans son courrier comme condition "un accord politique et (un) équilibre financier global maintenu".
"En rompant votre promesse, vous avez choisi le déshonneur", a lancé depuis la tribune la socialiste Estelle Mercier, en défense de la motion de censure."Vous avez méthodiquement vidé de son sens le conclave sur les retraites", a ajouté la députée, associant ce fin connaisseur d'Henri IV à la figure d'un "Ravaillac", qui a "poignardé la liste de (ses) engagements".
En réponse, François Bayrou a ironisé sur la motion de censure, prétexte selon lui pour que le Parti socialiste rappelle qu'il est "dans l'opposition", et a invoqué "le devoir" de "l'intérêt général", "plus fort que toutes les menaces" de censure.
Sur le fond, il a défendu des avancées actées pendant le conclave qu'il compte présenter au Parlement à l'automne dans le budget de la Sécurité sociale, notamment pour un départ sans décote à 66 ans et demi, ou pour les retraites des femmes.
Et le chef du gouvernement d'insister sur l'équilibre financier du système de retraites, sous peine de provoquer "une guerre des générations" : "Si personne n'alerte, si personne n'entend, nous allons nous perdre dans le surendettement".
- Censure inéluctable ? -
En réaction, le chef de file de LFI Jean-Luc Mélenchon a dénoncé sur X un "discours démagogique de Bayrou sur la dette que tous les gouvernements qu'il a soutenus ont creusée".
Le reste de la gauche, qui voulait une motion commune, votera largement la censure, dont le résultat devrait être connu après 20H00.
Mais en l'absence des voix RN du groupe de Marine Le Pen, qui ne devrait pas la voter, elle ne pourra atteindre les 289 voix nécessaires.
"Nous constatons la duplicité du Rassemblement national mais sommes-nous surpris ? (..) Quand c'est flou, il y a Bayrou et il y a aussi le RN", a pointé mardi lors d'un point presse Benjamin Lucas, porte-parole du groupe écologiste.
"Au Rassemblement national, nous considérons que l'on vote une motion de censure pour protéger les Français des mesures toxiques qui sont prises par un gouvernement (...).Censurer aujourd'hui n'apporterait rien", a argué mardi Marine Le Pen.
"En revanche (...) Nous serons extrêmement attentifs à la destinée de la programmation pluriannuelle de l'énergie (....) et au budget proposé par le gouvernement de M. Bayrou", a-t-elle ajouté devant des journalistes à l'Assemblée nationale.
"Ce gouvernement ne vivra pas très longtemps", avait prédit le patron du parti Jordan Bardella samedi.
Et la rentrée s'annonce houleuse pour le Premier ministre, qui devra naviguer entre les menaces de censure de la gauche et du RN pour trouver 40 milliards d'euros d'économies.
Avec un soutien des plus minimalistes du bloc central qui n'arrête pas de se déchirer.
"Le principal point commun des forces politiques qui soutiennent ce gouvernement.c'est de vouloir qu'il y ait un gouvernement en France.Voilà, on en est là", a résumé le leader de Renaissance Gabriel Attal.
"De toute façon il tombera.La seule question c'est quand.Si c'est à l'automne c'est dans la nature des choses", pense un cadre macroniste."François Bayrou est menacé de censure depuis le lendemain de sa nomination", philosophe Patrick Mignola, ministre des Relations avec le Parlement et proche du Premier ministre, qui promet: "Nous présenterons un budget courageux".