EDF, chlordécone, frais bancaires : les socialistes font passer leurs textes à l'Assemblée

Paris (AFP) - Après des succès sur EDF et la lutte contre les violences sexuelles dans le sport, les députés socialistes ont fait adopter jeudi soir un texte attendu sur la responsabilité de l'Etat dans le scandale sanitaire du chlordécone aux Antilles.
Porté par le député de Guadeloupe Elie Califer, le texte, qui devra aller au Sénat, prévoit que la "République française reconna(isse) sa responsabilité dans les préjudices sanitaires, moraux, écologiques et économiques" causés par l'utilisation de ce pesticide en Martinique et en Guadeloupe.
Le camp présidentiel avait un temps proposé de faire seulement reconnaître une "part de responsabilité" de l'Etat, la députée Renaissance Charlotte Parmentier-Lecocq soulignant que "d'autres responsabilités ont été à l'œuvre", dont celles de propriétaires d'exploitation ou d'élus locaux de l'époque.
Le texte a été adopté à l'unanimité mais les groupes de la majorité présidentielle se sont abstenus (un député MoDem a voté contre puis fait savoir aux services de l'Assemblée qu'il voulait s'abstenir).
La proposition a évolué en séance, parfois contre l'avis du rapporteur.La France s'assignerait en outre "l'objectif d'établir publiquement la responsabilité des décideurs politiques dans ce scandale d'Etat"."Il ne faut pas vouloir partir dans tous les sens", a ainsi regretté le ministre délégué à la Santé, Frédéric Valletoux.
"Bravo Elie Califer pour cette première étape ! Au gouvernement de prendre ses responsabilités", a réagi sur X le premier secrétaire du PS Olivier Faure.La députée écologiste Sandrine Rousseau, qui a fait adopter un amendement pour créer une "taxe additionnelle de 15% sur les bénéfices" des grandes entreprises de produits phytosanitaires, a salué un vote "historique".
Dans la foulée la députée Christine Pires Beaune a fait adopter à l'unanimité un texte beaucoup plus consensuel.Il prévoit notamment la suppression des frais de clôture de comptes incombant à un héritier, lorsque la personne décédée est mineure ou quand les sommes concernées sont inférieures à 5.000 euros.
Là encore le texte devra être examiné au Sénat.
Les socialistes ont en revanche fait adopter définitivement une autre loi pour mieux prévenir les violences sexuelles envers les mineurs dans les clubs sportifs.Elle prévoit de renforcer le contrôle des antécédents des éducateurs sportifs, qui deviendra annuel, et d'ajouter des obligations de signalements aux présidents de clubs.
- Stocks de médicaments -
Tôt jeudi matin, le député Philippe Brun a fait adopter une nouvelle fois un texte sur EDF, qui a sensiblement évolué au cours des allers-retours avec le Sénat.Il prévoit de sanctuariser dans la loi la détention d'EDF par l'État à 100%, déjà effective, avec l'ambition de prévenir un hypothétique démembrement à l'avenir.
Il entend aussi et surtout étendre au 1er février 2025 des Tarifs réglementés de vente d'électricité (TRVE) aux TPE, artisans ou encore aux petits agriculteurs, mesure qui pourrait rendre éligibles près de "10.000 communes" et "un million de TPE".
La proposition de loi avait jusqu'ici toujours été adoptée contre l'avis du gouvernement et du camp présidentiel, et aurait probablement pu encore passer de cette manière jeudi, mais elle a cette fois été validée à l'unanimité, avec le soutien de l'exécutif.Une entente qui ne s'est pas faite sans moyens de pression ni concessions.
Les deux rapporteurs ont accepté de renoncer à une obligation pour EDF de mettre en place une part d'actionnariat salarié: un amendement du gouvernement est venu transformer l'obligation en possibilité.Une détention à 100% d'Enedis par EDF a également été sacrifiée pour obtenir cet accord.
En échange, le gouvernement qui avait toujours combattu cette proposition de loi s'est engagé publiquement à l'inscrire au Sénat le 3 avril, en vue d'une adoption définitive.
Mais selon plusieurs députés de gauche, l'exécutif avait aussi fait planer la menace d'une saisine du Conseil constitutionnel, alors que la majorité a souligné à plusieurs reprises ces derniers mois que l'article sur les tarifs réglementés pourrait être censuré comme cavalier législatif.
Dans la soirée, la députée Valérie Rabault doit défendre sa proposition de "garantir la disponibilité des médicaments" en contraignant, sous peine de sanctions renforcées, les laboratoires à constituer un stock de sécurité minimal.