Qui sont les "buveurs de lait", ces chrétiens pacifistes bannis de Russie et installés en Turquie?

Les steppes d’altitude de la province de Kars sont le dernier refuge des Malakans et des Doukhobors, des chrétiens pacifistes jadis chassés de Russie pour hérésie. Nos journalistes ont rencontré leurs descendants.
Le danseur coiffé d’astrakan entre en piste en claquant ses talons bottés sur le parquet. La taille cintrée dans sa redingote noire, reins cambrés, torse bombé, offert bras en croix à un triomphe certain, il virevolte entre les tables du café Pouchkine, rue Atatürk, la principale artère de Kars. Sous le portrait du poète russe accroché au mur de briques, entre les plats d’oie rôtie circulant sur des lits de semoule, c’est le Caucase qui résonne.
Nous n’en sommes pas loin, dans ce recoin de Turquie aujourd’hui aux frontières de l’Arménie et de la Géorgie, autrefois de l’Empire russe, puis de l’URSS.
Une région qui garde la mémoire des empires qui s’y sont croisésÀ Kars, capitale régionale à 1 500 kilomètres à l’est d’Istanbul et des langueurs du Bosphore, réputée pour ses fromages et la rigueur de son climat, certains se souviennent avoir parlé, enfant, la langue de Pouchkine. Et pour cause : ils sont les derniers descendants des Malakans (parfois appelés Moloques) et des Doukhobors, (...)