Haïti: les Etats-Unis interdisent leurs vols civils après des tirs
Washington (AFP) - Les Etats-Unis ont interdit mardi tous leurs vols civils vers Haïti pour un mois après qu'un avion américain a essuyé des tirs la veille et ont sommé les autorités, dont un nouveau Premier ministre, à régler les crises qui minent ce pays pauvre des Caraïbes.
Haïti vit depuis des mois sous la violence de terribles gangs armés qui contrôlent 80% de la capitale Port-au-Prince, laquelle tourne au ralenti mardi avec des tirs nourris dans certains quartiers et de nouvelles menaces d'attaques.
La date de reprise de l'activité à l'aéroport n'a pas été officiellement annoncée mais des employés ont fait savoir à un correspondant de l'AFP que leur direction leur avait demandé de ne pas revenir avant le 18 novembre.
Lundi, des tirs ont touché un Airbus de la compagnie américaine à bas coûts Spirit Airlines juste avant d'atterrir à Port-au-Prince.L'appareil a été détourné en République dominicaine voisine.
Ces tirs, qui auraient pu provoquer une catastrophe aérienne, ont fait un "blessé léger" parmi l'équipage et des impacts de balles étaient visibles sur la carlingue et la cabine de l'Airbus, selon des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux.
En conséquence, le régulateur américain de l'aviation (FAA) a interdit mardi "les opérations de l'aviation civile des Etats-Unis sur le territoire et dans l'espace aérien d'Haïti sous 10.000 pieds pour une durée de 30 jours".
Spirit Airlines et American Airlines avaient immédiatement suspendu leurs liaisons entre les Etats-Unis et Haïti.
L'Association internationale du transport aérien (Iata) avait "appelé le gouvernement haïtien à agir immédiatement pour sécuriser les lignes aériennes et rétablir la confiance dans le secteur aérien du pays".
- Pression américaine -
L'incident est survenu quasiment au moment de l'investiture du nouveau Premier ministre haïtien Alix Didier Fils-Aimé, un homme d'affaires qui remplace Garry Conille, resté que cinq mois.
Nommé par le Conseil présidentiel de transition, le nouveau chef du gouvernement s'est "engagé" à "rétablir la sécurité" et promis de "travailler sans relâche (...) à la cohésion" politique.
C'est précisément ce qu'ont demandé les Etats-Unis mardi.
"Les besoins immédiats du peuple haïtien exigent que le gouvernement de transition donne la priorité à la gouvernance plutôt qu'à la concurrence entre les intérêts personnels des acteurs politiques", a mis en garde Matthew Miller, le porte-parole de la diplomatie américaine.
Les Etats-Unis, historiquement très impliqués dans les crises successives frappant Haïti, y compris militairement, ont "salué l'engagement" des autorités à "se doter d'un plan d'action qui définisse leur vision afin de renforcer la sécurité, la gouvernance et qui ouvre la voie vers des élections libres et justes".
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, par la voix de son porte-parole Stéphane Dujarric, a lui aussi "réitéré son appel une nouvelle fois à tous les protagonistes haïtiens à travailler ensemble de manière constructive".
M. Dujarric a précisé que les "tous les vols de l'ONU ont été suspendus, limitant évidemment l'afflux d'aide et de personnel humanitaires".
- Force internationale -
Haïti pâtit depuis des dizaines d'années d'une instabilité politique chronique et depuis des mois de la violence des gangs.Ces groupes armés, accusés de nombreux meurtres, viols, pillages et enlèvements contre rançon, s'étaient unis en début d'année pour renverser le Premier ministre d'alors, Ariel Henry.
Un Conseil présidentiel de transition avait été alors créé pour exercer le pouvoir exécutif, rétablir la sécurité et organiser des élections. Les dernières remontent à 2016 et Haïti n'a plus de président depuis 2021.
Mais les crises s'aggravent, malgré la mise en place d'une mission multinationale de soutien à la police.
Appuyée par l'ONU et les Etats-Unis, cette mission menée par le Kenya s'est déployée cet été avec seulement un peu plus de 400 hommes.
La représentation de l'ONU en Haïti (Binuh) a dénombré 1.233 meurtres entre juillet et septembre, dont 45% imputables aux forces de l'ordre et 47% aux gangs, dans ce pays de 12 millions d'habitants.
Des actes particulièrement violents visent parfois des enfants, avec des victimes mutilées avec des machettes, lapidées, décapitées, brûlées vives ou enterrées vivantes.
Des horreurs qui ont poussé plus de 700.000 personnes, pour moitié des enfants, à fuir leur domicile pour trouver refuge ailleurs dans le pays, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).
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