Prégabaline : la « drogue du pauvre » qui alarme les autorités face au danger d’overdose

La prégabaline, initialement prescrite contre l’épilepsie et les douleurs neuropathiques, fait l’objet d’une consommation détournée en France. Son usage abusif, notamment chez des publics précaires, alerte désormais les autorités sanitaires en raison du danger de surdose.
Tl;dr
- La prégabaline, détournée en drogue, inquiète les autorités.
- Trafic et consommation explosent malgré le renforcement des contrôles.
- Jeunes migrants et adultes, premières victimes du phénomène.
La prégabaline : l’essor inquiétant d’une « drogue du pauvre »
Derrière son nom commercial, Lyrica, la prégabaline était initialement un médicament destiné à soigner l’épilepsie ou le trouble anxieux généralisé. Pourtant, depuis quelques années, elle a quitté les pharmacies pour envahir les rues de grandes villes comme Paris et Marseille, où elle se négocie entre un et trois euros la gélule.
Ce détournement massif vers un usage récréatif, parfois qualifié de « drogue du pauvre », suscite une vigilance accrue des autorités sanitaires et douanières françaises.
Détournement, profils des usagers et dangers associés
S’il fallait dresser le portrait-robot des consommateurs, ce seraient souvent de jeunes adultes – en particulier des adolescents en situation migratoire – qui tombent dans l’engrenage. Selon la docteure Laurène Dufayet, médecin légiste à l’unité médico-judiciaire de l’Hôtel-Dieu (Paris), cette population y cherche à la fois une échappatoire et une stimulation psychique. Les effets recherchés ? Un mélange d’euphorie, d’analgésie et parfois de psycho-stimulation. Selon l’ANSM, près d’un quart des cas d’abus concernent des mineurs, tandis que les hommes représentent plus de 80% des signalements.
Mais le danger ne s’arrête pas là : couplée à d’autres substances telles que la MDMA ou la cocaïne, la prégabaline peut décupler les risques d’intoxication grave. La dépendance guette également ceux qui s’y abandonnent, du fait de son action directe sur le système nerveux central.
Lutte contre le trafic : saisies record et nouvelles stratégies
Face à cette montée en puissance du trafic – particulièrement marquée ces deux dernières années –, les douanes multiplient les opérations. En avril dernier à Paris, elles ont mis la main sur 30 000 doses lors d’une saisie exceptionnelle. Par ailleurs, il arrive fréquemment que des colis expédiés depuis l’étranger transitent par fret postal ou routier : à l’aéroport de Beauvais en janvier dernier, plus de 13 000 comprimés ont été interceptés sur un passager venu de Grèce. Cependant, selon Corinne Cléostrate, sous-directrice à la Direction générale des douanes, ces produits proviennent bien souvent d’origines multiples : Chine, Bulgarie, Pologne ou Allemagne.
En parallèle aux actions policières, certains pays comme l’Algérie voient aussi leur marché submergé par ces psychotropes très prisés.
Tentatives de régulation… mais mésusage persistant
Pour tenter d’endiguer le phénomène et limiter notamment les prescriptions frauduleuses, l’ANSM a renforcé dès 2021 les conditions d’accès au médicament : ordonnance sécurisée obligatoire et validité réduite à six mois.
Malgré ces garde-fous supplémentaires – qu’il faut bien qualifier de nécessaires –, le nombre de cas signalés continue pourtant sa progression. Lutter contre ce détournement massif apparaît plus que jamais comme un défi majeur pour les autorités sanitaires françaises.
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