Diffusion d'images pornographiques de mineurs: l'auteur de BD Bastien Vivès face à la justice

Nanterre (AFP) - Dessins potaches ou pédopornographiques ? L'auteur de bande dessinée Bastien Vivès est jugé à partir de mardi par le tribunal de Nanterre, accusé par plusieurs associations d'avoir réalisé et diffusé des dessins à caractère pornographique de mineurs dans deux de ses albums.
Le dessinateur de 41 ans comparaît jusqu'à mercredi pour "fixation et transmission en vue de la diffusion d'images à caractère pédopornographique", un délit passible de cinq ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende.
Les éditions Les Requins Marteaux et Glénat, qui ont publié les deux albums incriminés, comparaissent elles pour diffusion de l'image d'un mineur présentant un caractère pornographique.
Sollicité par l'AFP, Bastien Vivès, qui sera présent à l'audience, n'a pas souhaité s'exprimer avant le début de son procès.
En janvier 2023, une enquête avait été ouverte à la suite d'une plainte de plusieurs associations de protection de l'enfance.
Elle visait trois ouvrages du dessinateur: "Les Melons de la colère" (paru en 2011), "La Décharge mentale" (2018) et "Petit Paul" (2018).Ce sont ces deux derniers albums qui seront au cœur des débats.
"Petit Paul", qui avait déjà fait l'objet de deux signalements en 2018 et 2020, classés sans suite par le parquet de Nanterre, met en scène un enfant au pénis démesuré ayant des relations sexuelles avec des femmes majeures.
"La Décharge mentale" évoque un homme ayant des relations sexuelles avec de jeunes filles mineures.
Dans sa plainte, l'association Fondation pour l'enfance dénonçait des "représentations de mineurs dans des situations sexuellement explicites, présentant indubitablement un caractère pornographique", ce que la défense dément.
"Il n'y a jamais eu aucune incitation et aucune apologie de la pédophilie par Bastien Vivès dans ses œuvres", a assuré à l'AFP Me Richard Malka, avocat du dessinateur.
- "Stricte application de la loi" -
Pour Me Cécile Astolfe, qui défend la Fondation pour l'enfance, ce procès est pourtant la résultante d'une "stricte application de la loi".
"La représentation d'un mineur de moins de 15 ans présentant un caractère pornographique est interdite", a-t-elle insisté.
Trois autres associations, L'enfant bleu, Innocence en danger et Face à l'inceste, sont également parties civiles dans l'affaire.
Une dizaine de témoins sont également attendus parmi lesquels, côté défense, l'ancienne ministre de la Culture Françoise Nyssen (2017-2018) et le directeur de l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo, Riss.
En 2018, après la parution de "Petit Paul", les éditions Glénat avaient affirmé que cet album n'avait "jamais" eu "pour vocation de dédramatiser, favoriser ou légitimer l'abus de mineur de quelque manière que ce soit".
Dans un entretien avec l'AFP, la directrice de la maison d'édition, Marion Glénat-Corveler, a assuré qu'elle défendrait la liberté d'expression à l'audience, "une des valeurs fondamentales de (son) métier d'éditeur".
Plusieurs autres œuvres du dessinateur, à l'instar des "Melons de la colère", vague parodie des "Raisins de la colère" où plusieurs hommes violent une adolescente paysanne, avaient suscité l'indignation d'associations et de militants.
Le Festival international de la BD d'Angoulême avait d'ailleurs déprogrammé une exposition consacrée à Bastien Vivès prévue lors de son édition 2023, en raison de "menaces physiques" proférées contre lui.
En juin 2024, cinq personnes ont été condamnées à Paris à des peines de prison avec sursis pour menaces de mort ou violence sur l'auteur.