Comment Kiabi s’impose comme une exception dans un prêt-à-porter en crise

Alors que l’industrie du prêt-à-porter traverse une crise profonde, marquée par de nombreuses faillites, l’enseigne Kiabi tire son épingle du jeu. Retour sur les clés de cette réussite étonnante au sein d’un secteur en difficulté.
Tl;dr
- Kiabi résiste, tandis que les enseignes concurrentes s’effondrent.
- Stratégies : innovation, positionnement enfants, diversification géographique.
- Soutien clé de la famille Mulliez pour le développement.
Prêt-à-porter : quand l’exception Kiabi bouscule l’hécatombe du secteur
Au fil des années récentes, un véritable tsunami de défaillances s’est abattu sur les grandes enseignes françaises du prêt-à-porter. La liste s’allonge d’année en année : liquidation de Camaïeu en 2022, puis redressements judiciaires pour Kookaï et GAP en 2023.
En 2024, c’est Pimkie qui plie sous une procédure de sauvegarde après avoir supprimé plus de 250 postes et fermé 64 magasins. Et pour finir, la liquidation judiciaire rattrape Jennyfer à l’aube de 2025. Le secteur semble frappé d’un mal profond.
Un contexte ultra-concurrentiel aggravé par Internet
Derrière cette « apocalypse zombie », les causes sont désormais identifiées : une multiplication excessive des points de vente et une offre saturée dans chaque centre-ville, sans compter la concurrence qu’apporte internet. Autrement dit, la crise du secteur n’est pas née d’hier.
Pourtant, au cœur de cette tempête, un acteur tire remarquablement son épingle du jeu : Kiabi. En janvier dernier, la marque annonçait un chiffre d’affaires record en 2024 – soit 2,3 milliards d’euros (+5 %) – ainsi qu’une clientèle mondiale en hausse (24 millions). Un contraste saisissant.
L’antidote Kiabi : famille Mulliez et remise en question permanente
Ce succès n’a rien d’un hasard. Appartenant au puissant groupe familial Mulliez, également propriétaire de géants comme Decathlon, Auchan ou encore Leroy Merlin, la marque bénéficie d’une force de frappe économique hors norme. Cette assise permet à Kiabi d’innover sans cesse et même d’installer des corners dans certains magasins partenaires sans supporter le poids du loyer – un atout non négligeable pour capter les familles durant leurs courses.
L’innovation n’est pas qu’un mot creux ici. Comme l’explique Laurence Toy-Riont (Pixie Conseils) : « C’est une entreprise qui se remet très souvent en question, ne reste jamais sur ses acquis… Il y a un savoir-faire pour observer les signaux faibles et anticiper le marché.» Une agilité partagée avec d’autres enseignes du groupe.
À cela s’ajoute une ligne éditoriale invariable depuis quarante ans : proposer de la mode à petit prix. Là où certains concurrents se sont perdus dans des repositionnements coûteux ou des stratégies hésitantes, Kiabi est resté fidèle à son ADN.
Bébés-enfants et diversification : clés du modèle Kiabi
Mais ce n’est pas tout : l’autre secret réside dans le positionnement prioritaire sur les bébés et enfants – segments exigeant des renouvellements fréquents. Un choix stratégique alors que « les parents sacrifient rarement sur l’habillement enfant», souligne Anne-Laure Torossian. Ce segment était par ailleurs le seul encore en croissance en 2024 (+1,3 %). La présence physique reste aussi essentielle car essayer sur place demeure souvent indispensable pour ces tranches d’âge.
Enfin, Kiabi accélère sa diversification :
- Diversification géographique : présence désormais dans 33 pays dont plusieurs hors Europe.
- Offre élargie : lancement récent dans la seconde main avec Beebs by Kiabi ; arrivée sur les jouets et la décoration.
- Tournant digital : application permettant réservation en ligne avant essayage magasin.
Ainsi donc, alors que la majorité vacille ou tombe, Kiabi multiplie les contre-pieds audacieux — peut-être bien la seule manière aujourd’hui de survivre à l’apocalypse du secteur textile.