Paris (AFP) – Classes fermées, trains annulés et nombreux défilés: les syndicats organisent mardi une troisième mobilisation contre la réforme des retraites, la pression sur l’exécutif, mais aussi les députés qui viennent d’ouvrir les hostilités dans l’hémicycle.
Au deuxième jour de l’examen du texte qui s’est ouvert lundi dans une ambiance houleuse, les députés auront l’œil sur les mobilisations qui pourraient cependant marquer le pas par rapport aux deux précédentes journées.
Dans le secteur clé des transports, les grèves ont un peu moins d’impact sur le trafic, mais la circulation des trains et des métros reste « fortement perturbée » à la SNCF et à la RATP.
Si dans l’énergie, la CGT revendique une baisse d’environ 4.500 MW de production d’énergie, l’équivalent de plus de quatre réacteurs nucléaires, les usagers des transports ont appris à s’adapter aux perturbations.
« Je travaille dans le bâtiment à Saint-Rémy-lès-Chevreuse (Essonne).Je pars beaucoup plus tôt que d’habitude.C’est une vraie organisation, environ 1h30 plus tôt pour avoir un RER B. Là, je l’ai attendu 15 minutes.C’est la 3e fois en quelques jours donc on commence à savoir quoi faire », glisse Sydsa Diallo, 36 ans à la gare RER de Massy-Palaiseau, où il y avait foule à 7 heures du matin.
« Mon train n’a pas été annulé mais je suis venue à pied au lieu de prendre le bus », confie Hélène Dufour, 57 ans, en gare de Marseille Saint-Charles.Un peu plus loin, Rebecca Wells, une Anglaise de 28 ans sourit: « mon train roule donc ça va ».
« Les grèves sont très +Français+…Ce n’est pas quelque chose que nous (les Anglais) on faisait fréquemment jusqu’à récemment (une référence aux dernières grèves au Royaume-Uni) mais je ressens aussi de la colère et de la fatigue en Angleterre », observe-t-elle.
Unis contre le report de l’âge légal à 64 ans, les huit principaux syndicats français (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, Solidaires, FSU) entendent bien continuer à mettre la pression à l’exécutif, après deux journées réussies à plus d’un million de manifestants – selon les autorités.
Vacances obligent, moins de grévistes sont attendus chez les enseignants.A l’université de Rennes-2, les étudiants ont voté le blocage lundi.
Avec plus de 200 rassemblements prévus dans le pays, une source sécuritaire évoque une fourchette de 900.000 à 1,1 million de manifestants, dont 70.000 maximum à Paris.
Pour encadrer les foules, 11.000 policiers et gendarmes seront mobilisés, dont 4.000 dans la capitale.
– « Un problème démocratique » –
Les syndicats savent qu’il leur sera difficile de dépasser le record du 31 janvier – 1,27 million selon la police.Aussi le secrétaire général de la CFDT se projette vers la prochaine journée de samedi: « nous voulons en faire une fête du travail, avec des cortèges pacifiques et festifs ».
« Jusque-là les manifestations le mardi je ne pouvais pas à cause du travail, mais le samedi j’irai », illustre André Sivanos qui réside dans le Val-d’Oise.
Mais la suite reste incertaine. »Si on n’est pas entendus, je pense que le climat va largement se dégrader », prédit le numéro un de la CGT, Philippe Martinez, redoutant « un problème démocratique » si les députés « votent des lois qui sont contraires à ce que veut le peuple ».
Ses troupes se tiennent prêtes à hausser le ton dès la semaine prochaine, notamment dans l’énergie. »S’il faut aller vers un blocage plus large, on ira sans doute », prévient la patron de la CGT-Energie, Fabrice Coudour.
Pas de quoi faire reculer un gouvernement déterminé à tenir la promesse de campagne d’Emmanuel Macron. »C’est la réforme ou la faillite », affirme le ministre des Comptes publics, Gabriel Attal.
« L’immobilisme n’est pas permis », insiste son collègue, Olivier Dussopt.Fragilisé par des soupçons de « favoritisme » dans l’attribution d’un marché public lorsqu’il était maire d’Annonay (Ardèche), le ministre du Travail s’est dit « ouvert aux améliorations » sur le fond du texte.
Après les concessions accordées sur les petites pensions, puis les carrières longues, il a évoqué un « bilan d’étape » au Parlement, avant la présidentielle de 2027.Une nouvelle main tendue à la droite, dont les voix seront cruciales pour éviter à l’exécutif de recourir à l’arme du 49.3.
Les chances que tous ces sujets soient abordés sont cependant minimes: plus de 20.000 amendements ont été déposés, essentiellement par la gauche, rendant improbable un vote avant la date-butoir du 17 février.